Non classé19 novembre 2023Par Patrick LagadecPatrick Lagadec: Exercices hors cadre (Non Merci!)

Publié sur Linkedin le 19 novembre 2023.

Quand on pense « exercice de crise », on conçoit le plus souvent des scénarios « bien sous tout rapport », c’est-à-dire « conformes ». On s’entraîne à mobiliser les réponses connues, à coordonner des entités convenues, à communiquer selon les codes connus.

Dans un monde en mutation accélérée, cela est de moins en moins suffisant. Mais c’est tellement « rassurant », et l’aventure en terrain inconnu tellement « inquiétante » que le « Non Merci ! » est le plus souvent opposé à toute proposition en ce sens.

Retour sur un exercice où le patron des « Rouges » fit tout dérailler, en ne suivant pas les règles habituelles.

Été 2002, préparation à une attaque US contre un pays ennemi du Moyen-Orient. Pour l’exercice, le rôle du dirigeant ennemi est tenu par Paul Van Riper, général de marines, retraité.

Dès le début de l’exercice, et avec une tactique non orthodoxe, il coule une partie de la flotte US en route vers « son » pays. Il utilise une flottille de petits bateaux et d’avions virtuels, et attaque le premier. Il donna le signal de l’attaque non par un signal radio facilement interceptable mais par un message codé diffusé par les minarets des mosquées. 16 vaisseaux US sont envoyés par le fond, dont un porte-avions et deux porte-hélicoptères.

Illico, les officiers pilotant l’exercice suspendirent les opérations. Riper les entendit dire « que cela n’aurait jamais pu arriver ». Ce à quoi il mentionna le 11-Septembre. « Mais personne n’a paru intéressé par ma remarque ».

Les organisateurs décidèrent alors de ressusciter navires et soldats au grand étonnement du général.

Seconde ligne de rupture. Les organisateurs donnèrent instruction au général d’utiliser téléphones portables et satellites (ils avaient détruit les autres systèmes). Mais Riper refusa et décida d’utiliser des messagers à moto et des annonces faites depuis les mosquées. Les arbitres s’opposèrent : ils ne voulaient pas d’une solution qui ne serait pas pratiquée par l’Ouest.

« Le souci du général Van Riper était de faire en sorte que les nouveaux concepts recherchés par l’état-major soient sérieusement testés avant que les hostilités – les vraies – ne débutent ».

Bertrand d’Armagnac, « Le jour où Saddam Hussein a coulé la flotte US » Le Monde, 10 septembre 2002, page 17.

Pour approfondir :

 

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